Les moyens d’autonomisation des femmes dans l’ordre Juridique Marocain
Au Maroc, la question de l’émancipation des femmes marocaines s’est posée des décennies auparavant et ce même durant la période de lutte pour l’indépendance. Des transformations profondes ont été enregistrées depuis lors puisque des moyens juridiques assurant l’autonomisation de la femme marocaine et des programmes nationaux ont été mis en place à cet effet.
En matière d’autonomisation des femmes au Maroc, le Roi, en associant la question des femmes à la démocratisation et à la modernisation, a inclus la promotion des femmes dans son discours de mars 2011 au cours duquel il a annoncé la décision de réviser la Constitution pour intégrer les différentes revendications qui ont été faites à cet effet. La Constitution consacre le principe de l’égalité entre hommes et femmes en ce sens que son article 19 dispose : « L'homme et la femme jouissent, à égalité, des droits et libertés à caractère civil, politique, économique, social, culturel et environnemental, énoncés dans le présent titre et dans les autres dispositions de la Constitution, ainsi que dans les conventions et pactes internationaux dûment ratifiés par le Royaume et ce, dans le respect des dispositions de la Constitution, des constantes et des lois du Royaume. L'Etat marocain œuvre à la réalisation de la parité entre les hommes et les femmes. Il est créé, à cet effet, une Autorité pour la parité et la lutte contre toutes formes de discrimination. »1. En vertu des dispositions de cet article, le Maroc a connu une évolution dans la garantie et la protection des droits de l’Homme. Reconnaître le principe d’égalité des droits et des libertés entre les deux sexes signifie que le Maroc s’inscrit dans la lutte contre toutes formes de discrimination à l’égard des femmes. Dans sa vision de consolidation de la démocratie et de l’État de droit, il a ratifié les Conventions internationales sur les droits des femmes, notamment la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes et les deux Pactes relatifs aux droits civils et politiques et aux droits économiques, sociaux et culturels. L’article 19 de la Constitution, en harmonie avec la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, institue l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes formes de discriminations.
L’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes les formes de discriminations a été créée en vertu de l’article 19 de la Constitution de 2011. C’est une institution nationale indépendante jouissant d’une personnalité morale et d’une autonomie financière. Selon les dispositions de l’article 2 de la loi 79-14, l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes formes de discrimination a plusieurs attributions parmi lesquelles, elle est compétente pour émettre des propositions ou recommandations tendant à renforcer, à consacrer et à diffuser les valeurs d’égalité, de parité et de non-discrimination au Gouvernement ou à l’une des deux Chambres du Parlement. Elle est en mesure de recevoir et examiner les réclamations des victimes concernant les cas de discrimination, elle est compétente pour encourager et inciter à la mise en œuvre des principes d’égalité, de parité et de non-discrimination dans la vie publique.2 Elle témoigne d’un véritable progrès que connait le Royaume quoique, pour les associations qui militent pour les droits des femmes marocaines reconnaissent qu’il y a encore du chemin à parcourir. C’est dans l’optique de favoriser et de promouvoir le processus d’autonomisation des femmes, que le Maroc a mis en place non seulement ces moyens juridiques mais également des programmes nationaux à cet effet.
En vue de garantir l’autonomisation des femmes marocaines, le Maroc a mis en œuvre des programmes nationaux. Consacrer des textes juridiques et assurer leur applicabilité au moyen des programmes d’action est la vision dans laquelle s’est inscrit le Royaume. En effet, dans le cadre de la promotion des droits des femmes, le Maroc a mis en place le programme TAMKINE. C’est un programme multisectoriel qui a pour but de lutter contre les violences basées sur le genre par l’autonomisation des femmes et des filles marocaines. Sous l’initiative de son Altesse Royale la Princesse Lalla Meryem, il a été lancé le 30 mai 2008. Ses objectifs sont les suivants : l’appui à l’institutionnalisation du genre et des droits humains des femmes dans les politiques nationales et programme de développement ; la territorialisation des politiques nationales sensibles au genre dans six régions identifiées à la mise en place des espaces multifonctionnels pour l’autonomisation des femmes et des filles, des chaînes multisectorielles de prise en charge des femmes et des filles violentées et la sensibilisation et l’éducation pour une culture égalitaire. Ce programme marque la volonté de l’État de placer la protection des femmes et filles au cœur des préoccupations nationales.3
Toujours dans le cadre de la garantie de l’autonomisation des femmes, le Plan gouvernemental pour l’égalité a été mis en place par le Conseil du Gouvernement. Adopté le 06 juin 2013, ce programme est un outil destiné à traduire les engagements en matière de promotion des conditions des femmes marocaines. Il constitue un cadre pour une convergence des différentes initiatives prises en vue de l’intégration des droits des femmes dans les politiques publiques et les programmes de développement. En effet, il est composé de huit domaines d’action parmi lesquels nous avons la lutte contre toutes les formes de discrimination et de violence à l’encontre des femmes, le développement des infrastructures de base pour améliorer les conditions de vie des femmes et des jeunes filles et l’autonomisation sociale et économique des femmes. L’évaluation finale de la mise en œuvre de ce Plan révèle qu’il a contribué à concrétiser plusieurs exploits stratégiques, d’une part dans la mise en œuvre des dispositions constitutionnelles avec l’adoption du Projet de loi n°79-14 relatif à l’Autorité de la parité et de la lutte contre toutes formes de discrimination , et d’autre part dans les réformes législatives avec l’adoption par la première Chambre du Projet de loi n°103.13 relatif à la lutte contre la violence à l’égard des femmes, ce Projet de loi est en discussion au niveau de la deuxième Chambre. En revanche, l’autonomisation économique des femmes demeure un défi à relever.4 À l’instar de ces deux programmes, le Maroc a mis en place également l’Initiative Nationale pour le Développement Humain. Un programme de développement qui garantit l’autonomisation des femmes marocaines car il est axé sur la lutte contre la pauvreté, la précarité et l’exclusion sociale.
Dahir n° 1-11-91 du 29 juillet 2011 portant promulgation du texte de la Constitution, Bulletin Officiel, n° 5964, 30 juillet 2011, p. 7.
UNESCO, « Plan gouvernemental pour l’égalité-ICRAM 2012-2016 », 2017, https://en.unesco.org/creativity/policy-monitoring-platform/plan-gouvernemental-pour legalite?msclkid=b38b0052c81e11eca95ee791b4b63360 (Consulté le 30/04/2022)
Dahir n°1-17-47 du 21 septembre 2017 portant promulgation de la loi n°79-14 relative à l’Autorité pour la parité et la lutte contre toutes formes de discrimination, Bulletin Officiel, n°6644, 1er février 2018, p. 397.
Ministère du Développement Social de la Famille et de la Solidarité, « TAMKINE : Programme Multisectoriel de Lutte Contre les Violences Fondées sur le Genre par l’Autonomisation des Femmes et des Filles au Maroc », 2008, p. 10, https://evaw-global database.unwomen.org/-
/media/files/un%20women/vaw/full%20text/africa/programme%20multisectoriel%20de%20l utte%20contre%20les%20violences.pdf?vs=2130 (Consulté le 29/04/2022)
A propos de l’auteur :
Safia Mandjo est une jeune étudiante centrafricaine titulaire d'un diplôme en droit public. Elle est l'une de nos participantes au programme #Woman4Leadership. Elle est passionnée par la question des droits des femmes. Elle a écrit son projet de recherche sur : "L'autonomisation des femmes à travers le droit international et comparé." Son rêve est de voir la jeunesse africaine pleinement engagée et impliquée en politique. Elle est membre de l'association Vivre Ensemble au Maroc.